Peter De Ryck
Droit des sociétés, fusions et acquisitions
Private Equity & Venture Capital
Insolvabilité & Restructuration
peter.deryck@lydian.be
La propagation du Coronavirus a incité les gouvernements du monde entier à prendre des mesures de grande envergure, parmi lesquelles, l’interdiction de rassemblements sociaux. En ces temps de Coronavirus, il est déconseillé, voire interdit, de se rassembler physiquement ce qui signifie notamment pour les actionnaires et administrateurs de tenir des réunions physiques. La prolongation de la crise sanitaire actuelle dans les mois à venir entraînera également des problèmes pratiques pour de nombreuses sociétés belges dont l’exercice comptable correspond à l’année civile en ce qui concerne leurs obligations d’approbation des comptes annuels.
Seront présentées ci-dessous quelques alternatives pour une prise de décision valable, dans le cadre desquelles les administrateurs et les actionnaires peuvent procéder à la délibération et à la prise de décision sans être réunis physiquement. Nous avons également été informés que le gouvernement belge est en train d’élaborer des mesures visant à fournir, à court terme, des solutions flexibles supplémentaires pour l’organisation de l’assemblée générale ordinaire obligatoire.
Une première alternative à la tenue physique d’une assemblée générale des actionnaires est l’assemblée générale par voie de télécommunication, au cours de laquelle les délibérations et prises de décisions se font par voie électronique. La loi n’exige en effet pas la présence physique des participants à l’assemblée générale ; les réunions peuvent donc être organisées par le biais de télé (vidéo) conférences et applications web (telles que Starleaf, Microsoft Teams, Google Hangouts, Skype, etc.).
Un certain nombre de conditions doivent être remplies pour pouvoir avoir recours à la délibération et la prise de décision par voie électronique. Les statuts doivent en effet l’autoriser et il est indispensable que les moyens de télécommunication n’empêchent pas un débat direct et ininterrompu. Il doit, en outre, être possible de confirmer le quorum de présence au début de la réunion ; la société doit pouvoir vérifier l’identité de chaque participant (en utilisant par exemple l’e-ID). Avant de recourir à cette méthode, il est vivement recommandé de vérifier ce que prévoient les statuts de la société concernant la procédure à suivre et les conditions d’utilisation des moyens de télécommunication.
Si les statuts le prévoient, il est également possible que les actionnaires votent par anticipation. Ceci est possible tant par écrit que par voie électronique ; le vote électronique devant être vérifié (par exemple par l’utilisation de l’e-ID).
Le procès-verbal de l’assemblée générale doit indiquer la manière dont la réunion s’est tenue, le nombre de voix pour chacune des décisions prises et les difficultés (techniques) qui sont éventuellement survenues au cours de la délibération électronique. Il est en principe possible de signer tous les procès-verbaux par simple signature électronique, compte tenu du silence de la loi à cet égard et donc de l’absence d’exigence particulière.
Le Code des sociétés et associations (le CSA) ne permet pas aux administrateurs et commissaires (le cas échéant) de participer à l’assemblée générale ordinaire par voie de télécommunication. Il est donc conseillé de prévoir des renonciations des administrateurs et du commissaire dans lesquelles ils renoncent aux formalités de convocation et à la participation aux assemblées par voie électronique.
Enfin, dans l’hypothèse d’une prise de décision électronique, les formalités de convocation doivent être remplies et la convocation à l’assemblée générale doit explicitement indiquer la manière dont l’assemblée se tiendra.
Le conseil d’administration peut également se réunir par voie électronique, même si ce n’est pas explicitement prévu dans les statuts. La délibération et la prise de décision électronique ne doivent pas entraver un débat direct et ininterrompu.
Si une société souhaite recourir à la prise de décision électronique alors que ses statuts ne l’y autorisent pas, elle peut envisager de procéder à leur modification. Cette modification des statuts doit toutefois être constatée par un notaire dans un acte authentique.
Il est toutefois conseillé de consulter le notaire au préalable afin de s’assurer qu’une modification des statuts par acte authentique puisse intervenir dans le contexte de crise actuelle et compte tenu des directives émises par la Fédération royale du notariat belge concernant le Coronavirus.
Une deuxième alternative à la réunion physique sont les résolutions écrites. Le CSA prévoit que les actionnaires peuvent adopter, unanimement et par écrit, toutes les résolutions qui relèvent de la compétence de l’assemblée générale, à l’exception de celles qui doivent être établies par acte authentique. Il n’est donc pas requis que les statuts prévoient explicitement ce mode de prise de décision.
L’exigence de l’unanimité rend toutefois essentiel la consultation préalable de tous les actionnaires afin de vérifier qu’il y ait consensus.
Le conseil d’administration a également la possibilité de prendre des résolutions écrites. L’introduction du nouveau CSA a facilité le processus de décision écrite pour l’organe d’administration. Les conditions cumulatives, anciennement applicables, d’urgence et d’intérêt social ont été supprimées. La prise de décision par résolutions écrites est donc toujours possible pour l’organe d’administration en vertu de la législation actuelle sauf si les statuts en disposent autrement.
Les sociétés dont les statuts n’ont pas encore été adaptés au nouveau CSA doivent donc d’abord vérifier que ceux-ci ne contiennent pas de restrictions à l’usage des résolutions écrites (notamment une référence aux restrictions applicables avant l’entrée en vigueur du CSA, dont question ci-dessus).
Une troisième alternative afin de limiter tout contact physique est l’utilisation de procurations. Aucune autorisation statutaire n’est requise à cette fin. En ce qui concerne l’assemblée générale, ceci signifie qu’un actionnaire peut donner procuration à un autre actionnaire ou à un tiers pour assister à l’assemblée en personne et voter en son nom.
Concernant le conseil d’administration, un administrateur peut uniquement accorder une procuration à un autre administrateur pour assister et voter au conseil d’administration.
Il faut toutefois toujours vérifier que les statuts de la société n’imposent pas d’autres restrictions à cet égard.
L’assemblée générale peut éventuellement être reportée à une date ultérieure si les mesures liées au Coronavirus restent en vigueur pendant une longue durée. Les membres de l’organe de gestion restent toutefois tenus de veiller à ce que l’assemblée générale ordinaire se tienne dans les six mois suivant la fin de l’exercice social, sous peine de voir leur responsabilité d’administrateur engagée.
Malgré l’interdiction de rassemblements physiques, il existe donc différentes alternatives légales permettant une délibération et prise de décision valides du conseil d’administration et de l’assemblée générale des actionnaires. Il est toutefois important de toujours vérifier les dispositions statutaires de la société et de s’assurer que les actionnaires et administrateurs sont clairement informés de la manière dont les futures réunions se tiendront. Enfin, il convient d’attendre les éventuelles alternatives flexibles que proposeront les autorités belges pour permettre aux sociétés de remplir leurs obligations dans ces circonstances.
Outre l'impact du Coronavirus (COVID-19), désormais très répandu, sur notre vie personnelle quotidienne, les entreprises en Belgique et dans le monde entier sont également confrontées à des difficultés et des défis importants à tous les niveaux de leur activité quotidienne.
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