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Opter pour l'arbitrage : risques et opportunités en matière de preuve

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Il existe de nombreuses bonnes raisons d'opter pour l'arbitrage comme mécanisme de règlement des litiges lors de la négociation d'un contrat commercial. Vous disposez d'une procédure à instance unique qui permet de contourner l'arriéré judiciaire au niveau de la Cour d'appel. En outre, vous pouvez vous assurer que des arbitres spécialisés consacrent suffisamment de temps à votre affaire. Enfin, la sentence arbitrale a la même valeur qu'un jugement du tribunal et peut facilement être exécutée en Belgique, et au niveau international via la Convention de New York.

Une des caractéristiques de l'arbitrage qui est souvent négligée concerne les différentes techniques en matière de preuve qui peuvent être appliquées, surtout par rapport à ce qu’il se passe généralement devant les tribunaux belges. L'arbitrage permet en effet un régime beaucoup plus souple pour fournir des preuves factuelles. 

Nous mettons en évidence deux outils dont l'application en arbitrage (tant national qu'international) est très différente de celle devant les tribunaux belges.

A. La preuve par témoins

Bien qu'il soit possible de demander au tribunal d'entendre un témoin dans le cadre d'une procédure judiciaire belge, il s'agit d'une procédure lourde qui est rarement utilisée. En outre, il est possible de déposer des déclarations écrites de témoins, mais en l'absence de toute procédure spécifique permettant de contre-interroger les témoins, ces déclarations fourniront rarement les preuves dont une partie a besoin pour convaincre le tribunal de sa position.

Dans les procédures d'arbitrage, les témoignages sont toutefois généralement autorisés et fréquemment utilisés comme méthode pour fournir des preuves factuelles. Bien qu'il s'agisse et que cela reste une déclaration faite par une personne qui pourrait ne pas nécessairement être indépendante de la partie qui la présente, l'impact de cette déclaration ne doit pas être sous-estimé, de manière positive ou négative. En particulier, la possibilité d'entendre et de contre-interroger le témoin au cours de l'audience s'avère être un complément précieux à ce que le témoin a écrit dans sa déclaration écrite. Alors qu’une déclaration écrite n’est pas déposée sans l'approbation des avocats de la partie, le témoin doit, au cours de l'audience, répondre directement aux questions posées par le tribunal arbitral ou par le conseil chargé du contre-interrogatoire. Si le témoin a des preuves factuelles pertinentes à apporter, cet interrogatoire peut souvent s'avérer crucial. 

B. Production de documents

Dans le cadre d'une procédure judiciaire ordinaire, une partie peut demander au tribunal d'ordonner à l'autre partie ou à un tiers de produire un document s'il existe des indices sérieux et précis de la détention par cette partie ou par ce tiers, d'un document contenant la preuve d'un fait pertinent. Cette possibilité est strictement appliquée par les cours et tribunaux et se limite essentiellement à des documents très spécifiques dont l’existence ne fait aucun doute.

La procédure d'arbitrage offre une possibilité beaucoup plus large d'organiser la production de documents. Bien qu'elle ne puisse pas être comparée à la ‘discovery’ de type américain, un tribunal arbitral a généralement la possibilité d'ordonner à une partie - à la demande d'une autre partie - de fournir certaines catégories de documents bien identifiés. Il peut s'agir, par exemple, d'une série de courriels ou de lettres qui ont été échangés entre cette partie et une autre partie au cours d'une période donnée. Les tribunaux arbitraux n'autorisent pas les ‘fishing expeditions’ pour obtenir des preuves sans lien clair avec l'affaire en cours, mais dans ces limites, les parties peuvent parfois être surprises de se voir ordonner de rechercher et de fournir certains documents qu'elles n'avaient pas l'intention de fournir volontairement. Cela permet d'obtenir de la partie adverse des preuves qui ne pourraient pas être obtenues dans le cadre d'une procédure judiciaire normale, mais comporte également le risque que vous soyez vous-même obligé de fournir à la partie adverse des informations qui pourraient nuire à votre cause.

Le fait de ne pas se conformer aux exigences du tribunal arbitral comporte le risque que le tribunal arbitral tire des conclusions défavorables de ce non-respect, par exemple en concluant qu'un certain fait est prouvé.

Conclusion

La décision d'opter ou non pour une clause d'arbitrage dans un contrat commercial entraîne certaines conséquences dont une partie peut ne pas être immédiatement consciente au moment de conclure le contrat. Comme toujours, il est conseillé de prendre en compte toutes les circonstances du contrat pour décider si l'arbitrage est un bon mécanisme de résolution des litiges, ce qui sera le cas dans de nombreux cas.

Si vous avez des questions à ce sujet, n'hésitez pas à nous contacter.

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