
L’ordonnance octroyant le droit de préférence des locataires d’un logement à Bruxelles est conforme à la Constitution
Contexte
Depuis le 6 janvier 2024, les locataires d’un logement à Bruxelles disposent d’un droit de préférence, en vertu des articles 274/1 et suivants du Code bruxellois du logement, tels qu’insérés par l’ordonnance du 28 septembre 2023 portant modification du Code bruxellois du Logement en vue de mettre en place un droit de préférence pour les locataires d'un logement mis en vente (l’Ordonnance)[1].
L’arrêt n° 73/2025 du 30 avril 2025 de la Cour constitutionnelle
Par son arrêt n° 73/2025 du 30 avril 2025, la Cour constitutionnelle confirme que l’Ordonnance octroyant ce droit de préférence des locataires d’un logement à Bruxelles est conforme à la Constitution.
Les requérants à l’origine du recours en annulation, à savoir des ASBL et des sociétés actives dans le secteur de l’immobilier, ainsi que des agents immobiliers, soutiennent que l’Ordonnance modifie le fonctionnement des transactions tant pour la location que pour la vente de biens immobiliers.
En particulier, les requérants soutiennent que ce droit de préférence violerait le droit propriété, garanti notamment par l’article 16 de la Constitution, et créerait une discrimination entre les acquéreurs potentiels ou initiaux du bien, et les locataires de celui-ci.
Analyse
En ce qui concerne le droit de propriété, la Cour constitutionnelle se réfère aux travaux préparatoires, et considère que le droit de préférence du locataire mis en place par l’Ordonnance constitue une restriction du droit de propriété du bailleur, en ce qu’il limite la liberté de choisir l’acquéreur dès lors que, comme l’indiquent les travaux préparatoires. Toutefois, au regard de l’article 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution, garantissant le droit à un logement décent, cette restriction du droit de propriété répond à des objectifs légitimes en ce que l’Ordonnance vise à renforcer la stabilité de l’occupation du logement tout en favorisant l’accès du locataire à la propriété de celui-ci. Le législateur ordonnanciel a en effet souhaité favoriser l’accès à la propriété des locataires qui sont titulaires d’un bail de longue durée et qui s’inscrivent dans une démarche d’établissement à long terme dans le quartier qu’ils habitent.
Quant à la discrimination que créerait l’Ordonnance entre les locataires du bien, d’une part, et les acquéreurs potentiels ou initiaux de celui-ci, d’autre part, la Cour constitutionnelle considère que le fait d’être ou non titulaire d’un contrat de bail de résidence principale de longue durée portant sur le bien mis en vente est un critère de distinction objectif, et qu’il est également pertinent au regard du double objectif qui consiste à renforcer la stabilité de l’occupation du logement et à favoriser l’accès du locataire à la propriété. En outre, les mesures attaquées sont raisonnables et proportionnées.
Nous renvoyons le lecteur vers les passages pertinents de l’arrêt relatifs à l’action en subrogation prévue par l’Ordonnance[2].
Conclusion
Nous retiendrons notamment de cet arrêt que la Cour constitutionnelle insiste sur le large pouvoir d’appréciation du législateur pour déterminer sa politique en matière de logement, et singulièrement pour satisfaire à l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 23, alinéa 3, 3°, de la Constitution de garantir le droit à un logement décent.
[1] Moniteur belge, 27 décembre 2023.
[2] C. const, n° 73/2025, 30 avril 2025, B. 11 et suivants ; B.17 et suivants.
Auteurs
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Partner
Bruno Stroobants
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