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Données relatives à la santé issues d’objets connectés : nouvelles dispositions dans la loi sur les assurances

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La pratique du « pay as you drive » ou du « pay how you drive » s’est répandue ces dernières années auprès des assureurs auto. Grâce à l’utilisation d’un boîtier placé dans la voiture, le preneur d’assurance peut payer une prime plus basse (ou bénéficier d’avantages) en fonction des kilomètres parcourus ou de sa manière de conduire.
 
Au vu du succès d’une telle pratique et des avantages tant pour le preneur d’assurance que pour l’assureur, l’idée est née d’élargir le recours à de tels objets connectés (montres connectées, applications sur un smartphone) pour d’autres assurances et plus particulièrement les assurances maladie. Ainsi, un assureur maladie pourrait offrir un tarif plus avantageux pour une assurance maladie si le preneur s’engage à exercer un certain nombre d’activités physiques ou en fonction de la qualité de son sommeil ou de son type d’alimentation.
 
S’agissant toutefois de données relatives à la santé, qui sont par nature plus sensibles, plusieurs parlementaires ont déposé, en 2018, une proposition de loi visant à interdire, dans le cadre d’une assurance individuelle sur la vie et d’un contrat d’assurance maladie et quelle que soit la finalité, le traitement d’informations récoltées par un capteur de santé, relatives au mode de vie ou à l’état de santé du preneur d’assurance.
 
Suite à de nombreuses discussions, l’avis de l’Autorité de protection des données et plusieurs amendements, le législateur a finalement adopté la loi du 10 décembre 2020 modifiant la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances, publiée le 15 janvier 2021. Cette loi vise à établir dans le domaine de l’assurance maladie et de l’assurance individuelle sur la vie une restriction de traitement des données à caractère personnel concernant le mode de vie ou la santé issues des objets connectés.
 
Le législateur belge a ainsi utilisé la marge de manœuvre que lui offrait le RGPD en matière de limitation de traitement de données relatives à la santé. Dorénavant, même avec le consentement explicite du preneur d’assurance, certains traitements sont interdits. 
 
Le législateur belge a inséré un nouveau “Chapitre 3. Données à caractère personnel concernant le mode de vie ou la santé de l’assuré issues d’objets connectés.” dans la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances (les articles 46/1 à 46/3).

Quelles sont les assurance visées ?

Ces dispositions sont applicables :

  • à l’assurance individuelle sur la vie;
  • au contrat d’assurance maladie, à savoir :
    • l'assurance soins de santé qui garantit, en cas de maladie ou en cas de maladie et d'accident, des prestations relatives à tout traitement médical préventif, curatif ou diagnostique nécessaire à la préservation et/ou au rétablissement de la santé;
    • l'assurance incapacité de travail qui, en cas de maladie ou en cas de maladie et d'accident, indemnise totalement ou partiellement la diminution ou la perte de revenus professionnels due à l'incapacité de travail d'une personne;
    • l'assurance invalidité qui garantit une prestation en cas de maladie ou en cas de maladie et d'accident;
    • l'assurance soins non obligatoire qui prévoit des prestations en cas de perte totale ou partielle d'autonomie.

      Sont exclues de la définition du contrat d'assurance maladie :

      1. les assurances voyage et assistance temporaires qui garantissent les prestations visées ci-dessus;
      2. l'assurance accidents de travail loi et les assurances accidents complémentaires qui y sont liées;
      3. les assurances accident;
      4. les prestations de solidarité visées à l'article 1er de l'arrêté royal du 14 novembre 2003 fixant les prestations de solidarité liées aux régimes de pension complémentaires sociaux;
      5. les prestations de solidarité visées à l'article 1er de l'arrêté royal du 15 décembre 2003 fixant les prestations de solidarité liées aux conventions sociales de pension.

Quel est l’impact pour les assureurs vie et santé lors de la conclusion du contrat ?

Premièrement, le refus du candidat assuré d’acquérir ou d’utiliser un objet connecté qui récolte des données à caractère personnel concernant son mode de vie ou sa santé ne peut en aucun cas conduire à un refus d’assurance ni à une augmentation du coût du produit d’assurance.
 
Deuxièmement, aucune segmentation ne peut être opérée sur le plan de l’acceptation, de la tarification et/ou de l’étendue de la garantie sur la base de la condition que le candidat assuré accepte d’acquérir ou d’utiliser un objet connecté qui récolte des données à caractère personnel concernant son mode de vie ou sa santé, accepte de partager des informations récoltées par un tel objet connecté, ni sur la base de l’utilisation par l’assureur de telles informations. En pratique, ce sont les critères habituels de segmentation qui trouveront à s’appliquer. A cet égard, pour rappel, l’article 44 de la loi sur les assurances, prévoit que toute segmentation doit être objectivement justifiée par un objectif légitime, et les moyens de réaliser cet objectif doivent être appropriés et nécessaires.
 
Les présentes dispositions sont entrées en vigueur le 25 janvier 2021.

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